Droit pénal

Une femme est accusée d’avoir tué son mari

Une femme est accusée d’avoir tué son mari, son corps n’a jamais été retrouvé et elle a été condamnée. Des années après avoir purgé sa peine de prison, elle a découvert que l’homme vivait avec une autre femme. Elle est allée tirer sur l’homme à plusieurs reprises et il est mort pour de vrai cette fois-ci et elle a été de nouveau arrêtée pour le même meurtre sur la même personne.

En tant que juge, que ferez-vous ?
Considérerez- vous l’affaire comme un nouveau meurtre ou la considérerez-vous comme un crime dont elle a déjà purgé la peine ?

Ma position

1. Une personne peut être condamné pour meurtre même lorsqu’on n’a pas de cadavre sous nos yeux, cela s’est déjà produit. Si on peut considérer comme acquis qu’une personne est morte quand elle a disparu depuis assez longtemps. Il y a des dispositions de droit civil en ce sens on peut hériter de quelqu’un dont on suppose qu’il est mort. C’est la même chose en droit pénal. Bien sûr, l’absence de corps est un argument utilisé par la défense.

Certains peuvent soulever le principe « Actori incumbit incumbit probatio » ou « Le doute n’est-il pas censé profiter à l’accusé ? »

S’il suffisait de faire disparaître le corps du délit pour qu’il n’y ait pas délit, ce serait une incitation pour tous les meurtriers à faire disparaitre leur victime !

Rien dans le droit français ou congolais ne dit qu’il est nécessaire d’avoir un cadavre sous les yeux pour établir la réalité d’un meurtre.

Heureusement. Prenez l’exemple des dizaines de milliers de personnes disparues dans des dictatures militaires. Si l’on partait de ce principe, Augusto Pinochet n’aurait jamais pu être poursuivi au Chili. On peut établir une culpabilité de meurtre par des témoignages. Donc la démarche judiciaire portant sur la condamnation de la femme pour le meurtre de son mari sans cadavre est tout à fait normal.

𝗟𝗲 𝗳𝗮𝗶𝘁 𝗽𝗼𝘂𝗿 𝗰𝗲𝘁𝘁𝗲 𝗱𝗮𝗺𝗲 𝗱𝗲 𝗱𝗲𝗰𝗼𝘂𝘃𝗿𝗶𝗿 𝗾𝘂𝗲 𝘀𝗼𝗻 𝗺𝗮𝗿𝗶 ét𝗮𝗶𝘁 𝘁𝗼𝘂𝗷𝗼𝘂𝗿𝘀 𝘃𝗶𝘃𝗮𝗻𝘁 𝗮𝘃𝗲𝗰 𝘂𝗻𝗲 𝗮𝘂𝘁𝗿𝗲 𝗳𝗲𝗺𝗺𝗲 devrait déclencher la procédure de réhabilitation judiciaire pour que la justice puisse retirer le crime dont elle était accusé dans son casier judiciaire. Et peut-être réclamer des indemnités pour les préjudices qu’elle a subit à cause de cette heure judiciaire.

𝟯. 𝗟𝗮 décision 𝗽𝗿𝗶𝘀𝗲 𝗽𝗮𝗿 𝗰𝗲𝘁𝘁𝗲 𝗳𝗲𝗺𝗺𝗲 𝗱’𝗮𝗹𝗹𝗲𝗿 𝘁𝘂𝗲𝗿 𝘀𝗼𝗻 𝗲𝘅 𝗺𝗮𝗿𝗶 𝗲𝘀𝘁 𝘂𝗻𝗲 𝗴𝗿𝗮𝘃𝗲 𝗲𝗿𝗿𝗲𝘂𝗿 car « 𝗻𝘂𝗹 𝗻𝗲 𝗽𝗲𝘂𝘁 𝘀𝗲 𝗳𝗮𝗶𝗿𝗲 𝗷𝘂𝘀𝘁𝗶𝗰𝗲 à soi-même » Rappelons que pour la première fois, elle était poursuivie pour 𝗺𝗲𝘂𝗿𝘁𝗿𝗲 𝗱𝗲 𝘀𝗼𝗻 𝗺𝗮𝗿𝗶.
Cette fois-ci, elle sera poursuivie pour meurtre avec préméditation donc 𝗮𝘀𝘀𝗮𝘀𝘀𝗶𝗻𝗮𝘁 𝗱𝗲 𝘀𝗼𝗻 𝗲𝘅 𝗺𝗮𝗿𝗶.

𝟰. S’agissant de l’homme, il n’y a rien contre lui sur le plan pénal car 𝗱𝗶𝘀𝘀𝗶𝗺𝘂𝗹𝗲𝗿 𝘀𝗮 𝗽𝗿𝗼𝗽𝗿𝗲 𝗺𝗼𝗿𝘁 𝗻’𝗲𝘀𝘁 𝗽𝗮𝘀 𝘂𝗻𝗲 𝗶𝗻𝗳𝗿𝗮𝗰𝘁𝗶𝗼𝗻 𝗱𝗮𝗻𝘀 𝗻𝗼𝘁𝗿𝗲 𝘀𝘆𝘀𝘁è𝗺𝗲 𝗷𝘂𝗿𝗶𝗱𝗶𝗾𝘂𝗲.

𝟱. Concernant le principe 𝗻𝗼 𝗯𝗶𝘀 𝗶𝗻 𝗶𝗱𝗲𝗺, il faut savoir que ce principe n’empêche pas de retenir deux qualifications lorsqu’elles sont fondées sur des faits dissociables ou lorsque, fondées sur les mêmes faits, la seconde incrimination tend à la protection d’un intérêt spécifique expressément exclu du champ d’application de la première

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Toni Lokadi

Toni Lokadi

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