La semaine dernière, un enfant a été tué par un chien dans la commune de N’Djili qui est une banlieue de la ville de Kinshasa capitale de la République démocratique du Congo. Après réflexion sur base des éléments d’informations en notre possession sur la situation, nous estimons que le propriétaire du chien pourrait être poursuivi pour homicide involontaire sur le plan pénal et sur le plan civil, sa responsabilité était également engagée du fait qu’il est le gardien du chien. Dans les lignes suivantes, nous allons faire une analyse sur l’infraction d’homicide involontaire en droit congolais.
1. Qu’est-ce que l’on entend par homicide involontaire ?
Un homicide involontaire est une mort causée par une action ou une omission involontaire. Cela peut inclure des accidents, des négligences ou des actes criminels non intentionnels. L’homicide involontaire est aussi appelé homicide par imprudence.
C’est dans cette logique que la Cour suprême de justice avait affirmé ceci le 25 mars 1980 : « Est ainsi coupable de cette prévention, le propriétaire d’un chien enragé qui a causé la mort de la victime des morsures, s’il est établi que ce chien n’était pas vacciné et qu’il a profité de la liberté lui accordée par son maître qui n’avait pas pris les précautions d’enfermer son chien dans sa maison ni de le tenir en laisse » voir C.S.J., R.P 288, 25 mars 1980 cité par Dibunda DIBUNDA KABUINJI dans Répertoire général de jurisprudence de la cour suprême de justice, Édition Connaissance et Pratique du Droit Zaïrois « C.P.D.Z », Kinshasa, 1990, p.102
2. Quand est-ce que l’infraction d’homicide involontaire est imputée à un individu ?
La faute de l’auteur est requise pour que l’infraction d’homicide involontaire puisse être imputée à individu.
L’auteur de l’homicide involontaire doit être à l’origine d’une faute. Le comportement fautif peut être volontaire ou involontaire.
3. De quoi peut être constitué cette faute ?
Cette faute peut consister dans :
– la négligence, c’est-à-dire l’insouciance, l’inaction, l’abstention ou l’omission;
– l’inattention, c’est-à-dire le manque d’entretien, l’étourderie ;
– l’imprudence, c’est-à-dire un défaut de prudence ou une imprévoyance ou encore une témérité ;
– la maladresse, c’est-à-dire un manque d’adresse, d’habilité ou de dextérité ;
– l’inobservance des règlements, c’est-à-dire la violation des prescriptions qui réglementent la circulation routière.
Ce qu’il faut retenir ici est que le manquement à une obligation de prudence ou de sécurité imposée par la loi ou le règlement constitue un comportement fautif.
La faute simple suffit à constituer l’homicide involontaire.
4. Quels sont les éléments constitutifs de l’homicide involontaire ?
a) L’élément légal
L’article 53 du code pénal dispose que : « quiconque aura involontairement causé la mort d’une personne sera puni… ».
Il précise l’élément matériel et moral.
L’homicide involontaire est soumis à la définition commune de la faute en lien de causalité avec le dommage. L’homicide involontaire est une atteinte à la vie et à l’intégrité de la personne. La répression n’est envisagée qu’en cas de préjudice.
L’homicide involontaire est une infraction matérielle. Le dommage est un élément constitutif à part entière de l’infraction.
Pour que l’infraction d’homicide involontaire soit établie, elle doit réunir différents autres éléments.
b) Un fait matériel
La mort de la victime est l’élément matériel de l’homicide. L’infraction d’homicide n’est donc consommé que par la mort de la victime.
L’infraction impossible d’homicide involontaire sur cadavre n’est pas punissable, car l’élément constitutif de la mort de la victime fait défaut. Rappelons que l’infraction d’homicide involontaire ne peut s’appliquer que si la victime était vivante avant le fait reproché au prévenu.
c) Après une faute, même non intentionnelle de l’agent.
La faute doit nécessairement avoir causé la mort de la victime, élément constitutif à part entière de l’infraction. Il en a été ainsi des prévenus qui ont soumis une fillette à un jeûne et à la prière aux fins de la délivrer et mort s’en est suivie( Tribunal de paix de kisangani/Makiso., RP 1633, 07 novembre 2003, ministère public contre les prévenus Meshake Singwadi et José Yaluli Elie, inédit.)
Si le décès apparaît postérieurement comme une manifestation de l’aggravation des blessures initiales, l’auteur de la faute subira cette conséquence pendant la durée de la procédure. Le juge doit privilégier la qualification pénale en tenant compte du dommage au jour où il statue et retenir l’infraction sous sa haute expression pénale.
d) le lien de causalité entre la faute commise et le dommage subi par la victime, c’est-à-dire la mort.
L’homicide involontaire suppose que soit établi un lien de causalité, qui unit la cause à l’effet, entre le comportement fautif et la mort de la victime, c’est-à-dire la faute au dommage.
Le législateur exige l’existence d’un lien de causalité entre la faute commise et la mort survenue. Cette cause peut être directe ou indirecte, médiate ou immédiate.
Le lien de causalité doit être certain, mais il ne doit pas relier la faute au dommage par une relation directe, exclusive et immédiate. La responsabilité pénale de l’agent doit être retenue. Il a été jugé qu’est coupable d’homicide involontaire le propriétaire d’un chien enragé qui a causé la mort de la victime des morsures, s’il est établi que ce chien n’était pas vacciné et qu’il a profité de la liberté lui accordée par son maître qui n’avait pas pris les précautions de l’enfermer dans sa maison ou de le tenir en liasse (C.S.J.,RPA 77, 25 mars 1983, R.J.Z, 1983,p.15 )
5. Que risque la personne poursuivi pour homicide involontaire ?
La réponse nous vient de l’article 53 du code pénal congolais livre II qui définit et sanctionne l’homicide involontaire. La sanction est de trois mois à deux ans de servitude pénale principale et une amende. Le législateur n’a pas laissé de possibilité d’infliger la seule peine d’amende.
6. Quel est tribunal compétent pour connaître l’infraction d’homicide involontaire ?
Le tribunal de paix ( Tripaix Ndjili pour le cas de mort de l’enfant survenu la semaine dernière) est matériellement compétent pour juger cette infraction. Le Tripaix peut aussi ordonner la réparation civile du préjudice occasionné.
7. Qu’en est-il de la prescription de l’action publique en cas d’homicide involontaire ?
En droit pénal congolais, la prescription de l’action contre un homicide involontaire est de 3 ans. Elle débute à partir du jour où l’infraction a été commise, dès la constatation du décès de la victime. Cela signifie qu’au-delà de ce délai, vous ne pourrez plus engager des poursuites judiciaires contre l’auteur de l’infraction
Références :
• Code pénal congolais
• Répertoire général de jurisprudence de la cour suprême de justice, Édition Connaissance et Pratique du Droit Zaïrois « C.P.D.Z », Kinshasa, 1990 : Dibunda DIBUNDA KABUINJI
• Les infractions et leur répression en droit congolais : Bony CIZUNGU M. NYANGEZI
• Recueil des jugements et arrêts des juridictions des ressorts des cours d’appel de Bukavu, Goma, Kananga, Kindu et Kisangani : Avocats sans frontières