Droit de la famille

Le mariage en droit ivoirien

Le mariage en droit ivoirien

Le mariage en Côte d’Ivoire est régi par la loi n° 2019-570 du 26 juin 2019, qui a apporté plusieurs innovations par rapport à l’ancienne loi de 1983. Parmi ces innovations, on peut citer la réintroduction de l’article 1 qui précise que le mariage est l’union d’un homme et d’une femme, la création d’un troisième régime matrimonial basé sur le contrat de mariage par acte notarié, la suppression de l’interdiction de la dot, et la clarification des effets patrimoniaux du mariage.

1. La formation du mariage

En droit ivoirien, la formation du mariage comporte deux conditions des conditions de fond et des conditions de forme.

a. Les conditions de fond

Le mariage est une institution juridique qui crée des liens entre deux personnes. Pour qu’un mariage soit valable, il faut respecter certaines conditions de fond, c’est-à-dire des exigences relatives à la capacité, au consentement et à l’absence d’empêchements des futurs époux. Ces conditions sont prévues par le Code civil et visent à garantir la liberté et la sincérité du choix matrimonial, ainsi que le respect des principes fondamentaux du droit de la famille.

La première condition de fond pour la formation du mariage est la capacité matrimoniale. Il s’agit de l’aptitude juridique à contracter mariage. Selon la loi[1] de 2019 relatif au mariage, il faut avoir 18 ans révolus pour se marier, sauf dispense accordée par le procureur de la République pour motif grave. La capacité matrimoniale dépend également de la nationalité des futurs époux. En effet, selon l’article 25 de la loi, le mariage contracté en pays ivoiriens ou entre un ivoirien et un étranger est valable s’il a été célébré dans les formes usitées dans le pays considéré, à condition que l’ivoirien n’ait point contrevenu aux dispositions de fond exigées par la loi ivoirienne. Il en est de même du mariage contracté en pays étranger entre ivoiriens ou entre un ivoirien et un étranger s’il a été célébré par les agents diplomatiques ou les consuls de la Côte d’Ivoire conformément à la loi ivoirienne.

La deuxième condition de fond pour la formation du mariage est le consentement des futurs époux. Il s’agit de l’expression libre et éclairée de leur volonté de se marier. Le consentement doit être donné personnellement par les intéressés, sans contrainte ni erreur. L’article 4 de la  loi n° 2019-570 du 26 juin 2019 sur le mariage dispose que ” Chacun des futurs époux doit consentir personnellement au mariage. Le consentement n’est pas valable s’il a été extorqué par la violence ou s’il n’a été donné que par suite d’une erreur sur l’identité physique ou civile de la personne. Le consentement n’est pas non plus valable, si celui qui l’a donné ignorait l’incapacité physique de consommer le mariage ou l’impossibilité de procréer de l’autre époux, connue par ce dernier avant le mariage.”. Le consentement doit être manifesté lors de la célébration du mariage devant l’officier de l’état civil. Si le consentement fait défaut ou est vicié, le mariage peut être annulé à la demande de l’un des époux ou du ministère public.

La troisième condition de fond pour la formation du mariage est l’absence d’empêchements[2] légaux. Il s’agit de situations qui interdisent ou limitent le mariage entre certaines personnes. Les principaux empêchements sont prévus par les articles 6 et 7 de la  loi n° 2019-570 du 26 juin 2019 sur le mariage et concernent les liens de parenté ou d’alliance, la bigamie et l’inceste. Ces empêchements visent à protéger l’ordre public et les intérêts moraux et sociaux de la famille. Certains empêchements peuvent faire l’objet d’une dispense accordée par le procureur de la République pour des motifs graves et exceptionnels.

En effet, les conditions de fond pour la formation du mariage sont essentielles pour assurer la validité et la stabilité de l’union conjugale. Elles doivent être vérifiées avant la célébration du mariage par l’officier de l’état civil, qui peut refuser de procéder à l’acte s’il constate une irrégularité ou une fraude. Le non-respect des conditions de fond peut entraîner la nullité du mariage, qui peut avoir des conséquences importantes sur les droits et les obligations des époux et des enfants.

b. Les conditions de forme

Un mariage pour qu’il puisse être valable doit remplir certaines conditions de forme, c’est-à-dire des règles relatives à la publicité, à la célébration et à la preuve du mariage. Ces conditions visent à garantir le consentement libre et éclairé des époux, ainsi qu’à protéger l’ordre public et les tiers.

Pour qu’un mariage soit valable en droit ivoirien, il faut respecter certaines conditions de forme, c’est-à-dire les règles relatives à la célébration du mariage par l’officier de l’état civil. Ces conditions sont les suivantes :

En Côte d’ivoire, le mariage est obligatoirement célébré par un officier de l’état civil[3]. Seul le mariage célébré par un officier de l’état civil a des effets légaux[4].

Dix (10) jours francs au moins avant la date fixée pour la célébration du mariage, chacun des futurs époux doit remettre à l’officier de l’état civil compétent pour y procéder[5] :

1°) un extrait de son acte de naissance ou une copie du jugement supplétif en tenant lieu datant de moins de trois (3) mois ;

2°) la copie des actes accordant des dispenses, dans les cas prévus par la loi ;

3°) toutes autres pièces qui pourraient lui être réclamées et propres à établir que les conditions du mariage sont réunies.

Lorsque les futurs époux se présentent devant l’officier de l’état civil, comme il est dit à l’article précédent, pour y déposer leurs actes de naissance, celui-ci doit leur demander la présentation soit de l’acte de décès du précédent conjoint, soit I’ expédition du jugement déclaratif d’absence, soit la preuve de  l’accomplissement formalités prévues à l’article 3 alinéa 2, s’ils ont déjà été mariés[6].

L’officier de l’état civil doit, en outre, interpeler les futurs époux d’avoir à déclarer s’ils optent pour le régime de la communauté de biens ou celui de la séparation de biens, ou s’ils ont conclu un contrat de mariage. Si les époux ont convenu des règles relatives à leur régime matrimonial par acte notarié, l’officier d’état civil reçoit l’acte. L’officier de l’état civil donne acte aux futurs époux de leur choix[7].

Un (1) mois avant la célébration du mariage, l’officier de l’état civil fait une publication par voie d’affichage au siège de la circonscription de l’état civil du lieu de célébration du mariage et de celui de la résidence de chacun des futurs époux[8]. Avant de procéder à la célébration du mariage, l’officier de l’état civil s’assure que les conditions de fond et de forme exigées par la loi sont remplies. S’il constate qu’elles ne le sont pas, il refuse de célébrer le mariage et procède comme il est dit à l’article[9].

En respectant ces conditions de forme, les futurs époux peuvent se marier en toute légalité et bénéficier des droits et obligations découlant du mariage.

Le mariage est un acte juridique qui implique le respect de certaines conditions de forme et de fond. Les conditions de forme sont relatives à la célébration du mariage et dépendent de la loi du lieu où il a lieu (lege fori). Les conditions de fond sont relatives à la capacité et au consentement des époux et dépendent de leur statut personnel[10]. En Cote d’Ivoire, les conditions de fond du mariage sont notamment, l’âge minimum de 18 ans, le consentement libre et éclairé, l’absence de lien de parenté ou d’alliance prohibé et l’absence d’empêchement résultant d’une situation conjugale antérieure. Ces conditions sont prévues par le Code civil et visent à garantir la validité et la sécurité juridique du mariage[11].

2. Les effets du mariage

Le mariage est un contrat qui crée des liens juridiques entre les époux. Ces liens se traduisent par des effets personnels[12] et patrimoniaux du mariage. Dans ce paragraphe, nous allons nous intéresser aux effets personnels du mariage, c’est-à-dire aux droits et devoirs des époux.

a. Les droits et devoirs des époux

Les époux s’obligent à la communauté de vie. Ils se doivent mutuellement respect, fidélité, secours et assistance. Ces droits et devoirs sont énoncés par l’article 47 de la  loi n° 2019-570 du 26 juin 2019 sur le mariage 47  .Ils concernent notamment :

  • La communauté de vie implique que les époux vivent ensemble sous le même toit, sauf si des circonstances particulières les en empêchent (par exemple, pour des raisons professionnelles ou de santé). Cette obligation vise à favoriser l’harmonie et la solidarité du couple. Elle n’interdit pas aux époux d’avoir des activités personnelles ou des centres d’intérêt différents, mais elle suppose qu’ils partagent un projet de vie commun et qu’ils maintiennent une communication régulière. La violation de cette obligation peut être invoquée comme une cause de divorce pour faute ou pour altération définitive du lien conjugal[13].
  • Le respect mutuel signifie que les époux doivent se traiter avec dignité, courtoisie et considération. Ils doivent éviter toute forme de violence, physique ou psychologique, ainsi que toute atteinte à l’honneur ou à la réputation de l’autre. Ils doivent également respecter la liberté et l’autonomie de l’autre, sans chercher à le contrôler ou à l’empêcher de s’épanouir. Le respect mutuel implique aussi le respect de la vie privée et du secret des correspondances. Le non-respect de cette obligation peut constituer une faute grave pouvant entraîner le divorce[14].
  • La fidélité implique que les époux doivent s’abstenir de toute relation sexuelle ou sentimentale avec une autre personne que leur conjoint. Il s’agit d’une manifestation de la confiance et de l’exclusivité qui caractérisent le lien matrimonial. La fidélité n’est pas seulement une obligation morale, mais aussi une obligation juridique dont la violation peut avoir des conséquences importantes. En effet, l’adultère est une cause de divorce pour faute qui peut entraîner la perte des droits du conjoint infidèle (par exemple, le droit à une prestation compensatoire ou à une pension alimentaire). L’adultère peut également avoir des incidences sur la filiation des enfants nés pendant le mariage[15].
  • Le secours et l’assistance impliquent que les époux doivent se soutenir mutuellement dans les moments difficiles, qu’ils soient d’ordre matériel, moral ou affectif. Ils doivent se porter aide et secours en cas de maladie, d’accident, de chômage ou de toute autre situation précaire. Ils doivent également contribuer aux charges du mariage selon leurs facultés respectives, c’est-à-dire participer aux dépenses communes liées au logement, à l’éducation des enfants, au train de vie du ménage, etc. Le secours et l’assistance sont des obligations réciproques qui perdurent même après le divorce, sauf en cas de faute grave du bénéficiaire[16].

Ces droits et devoirs sont impératifs et ne peuvent pas être modifiés par une convention matrimoniale. Ils s’imposent aux époux pendant toute la durée du mariage, même en cas de séparation de fait ou de corps. Ils cessent seulement en cas de divorce ou de décès.

Dans le cas où la cohabitation présente un danger d’ordre physique ou moral pour l’un des époux, celui-ci peut demander à être autorisé à résider séparément pour une durée déterminée, par ordonnance du président du tribunal ou d’un juge qu’il délègue à cet effet, statuant en chambre du conseil, dans la huitaine de sa saisine, suivant la procédure de référé. Cette ordonnance est signifiée par un commissaire de Justice commis d’office par le juge saisi. L’ordonnance du président du tribunal ou du juge qu’il délègue peut faire l’objet d’appel dans un délai de huit (8) jours. Le délai entre la date de signification de l’acte d’appel et celle fixée pour l’audience est de huit (8) jours au moins sans pouvoir excéder quinze (15) jours. La Cour d’Appel statue dans un délai de quinze (15) jours à compter de sa saisine[17].

b. Le régime matrimonial[18]

Le régime matrimonial désigne l’ensemble des règles régissant les relations financières entre époux[19].

Le régime matrimonial règle les effets patrimoniaux du mariage dans les rapports des époux entre eux et à l’égard des tiers. Les époux peuvent faire quant à leurs biens les conventions qu’ils jugent à propos, pourvu qu’elles ne soient pas contraires aux bonnes mœurs, à l’ordre public, ou aux dispositions de la présente loi. Toutes les conventions matrimoniales seront rédigées par acte notarié avant la célébration du mariage et ne prendront effet qu’à dater de cette célébration[20].

Le mariage crée entre les époux soit le régime de la communauté de biens, soit celui de la séparation de biens, si les époux n’ont pas réglé les effets pécuniaires de leur mariage par convention[21]. Les époux ne peuvent, par convention, déroger ni aux devoirs ni aux droits qui résultent pour eux du régime matrimonial qu’ils ont choisi[22]. Lorsque le mariage est célébré, il ne peut être apporté de changement au régime matrimonial adopté par les époux que dans le seul intérêt de la famille[23]. La requête en changement de régime matrimonial peut être présentée par les deux époux ou par l’un des époux après deux (2) années d’application du régime adopté. Elle est introduite suivant les formes de droit commun devant le tribunal du domicile ou de la résidence des époux[24].

Il existe deux types de régimes matrimoniaux en droit ivoirien : le régime légal et le régime conventionnel.

L’actif de la communauté se compose[25] :

1°) des gains et revenus des époux ;

2°) des biens acquis par les époux à titre onéreux pendant le mariage, à l’exclusion des biens visés à l’article 73 ;

3°) des biens donnés aux deux époux.

Sont propres[26] :

1°) les biens que les époux possèdent à la date de leur mariage ou qu’ils acquièrent postérieurement au mariage par succession ou donation ;

2°) les biens acquis à titre onéreux pendant le mariage, lorsque cette acquisition a été faite avec des deniers propres ou provenant de l’aliénation d’un bien propre ;

3°) les vêtements et linges à usage personnels de l’un des époux, les actions en réparation d’un dommage corporel ou moral, les créances et pensions incessibles et généralement tous les biens qui ont un caractère personnel et les droits exclusivement attachés à la personne ;

4°) les biens acquis à d’accessoire d’un bien propre avec des deniers propres ainsi que les valeurs nouvelles et autres accroissements se rattachant à des valeurs mobilières propres ;

5°) les instruments de travail nécessaires à la profession d’un des époux à moins qu’ils soient l’accessoire d’un fonds de commerce ou d’une exploitation faisant partie de la communauté et sous réserve des dispositions de l’article 80. Tout bien est présumé commun si l’un des époux ne prouve qu’il lui est propre[27].

Notes et références

[1]L’article 2 de la  loi n° 2019-570 du 26 juin 2019 sur le mariage

[2] Les articles 6 et 7 de la  loi n° 2019-570 du 26 juin 2019 sur le mariage

[3] L’article 13 de la  loi n° 2019-570 du 26 juin 2019 sur le mariage

[4] L’article 14 de la  loi n° 2019-570 du 26 juin 2019 sur le mariage

[5] L’article 15 de la  loi n° 2019-570 du 26 juin 2019 sur le mariage

[6] L’article 16 de la  loi n° 2019-570 du 26 juin 2019 sur le mariage

[7] L’article 17 de la  loi n° 2019-570 du 26 juin 2019 sur le mariage

[8] L’article 18 de la  loi n° 2019-570 du 26 juin 2019 sur le mariage

[9] L’article 19 de la  loi n° 2019-570 du 26 juin 2019 sur le mariage

[10] Aurélien Bamdé et J. Bourdoiseau ont écrit sur les conditions de formation du mariage. Selon leur site web, l’étude de la formation du mariage suppose d’envisager les conditions du mariage et la sanction du non-respect desdites conditions, consulté le 02 Juin 2023 à 12H43

[11] P. Mayer & V. Heuzé, Mariage et divorce en droit international privé français, LGDJ, 2019, p.75

[12] Les articles 44 à 57 de la  loi n° 2019-570 du 26 juin 2019 sur le mariage

[13] Le mariage en droit français (notions de base), CICADE, 2015, p. 2

[14] Droit civil – Les personnes – La famille – Les incapacités, Philippe Malaurie et Hugues Fulchiron, LGDJ, 2020, p. 96

[15] Droit civil – Les régimes matrimoniaux, Philippe Malinvaud et François Terré, Dalloz, 2019, p. 23

[16] Droit civil – Les obligations – Le contrat – Théorie générale, François Terré et Philippe Simler, Dalloz, 2018, p. 13

[17] Prevus par les articles 58 à 102 de la  loi n° 2019-570 du 26 juin 2019 sur le mariage

[18] Les articles 44 à 57 de la  loi n° 2019-570 du 26 juin 2019 sur le mariage

[19] La loi et les femmes ivoiriennes – JSTOR in https://www.jstor.org/stable/40460886 consulté le 15/05/2023

[20] 57 de la  loi n° 2019-570 du 26 juin 2019 sur le mariage

[21] L’article 59 de la  loi n° 2019-570 du 26 juin 2019 sur le mariage

[22] L’article 60 de la  loi n° 2019-570 du 26 juin 2019 sur le mariage

[23] L’article 61 de la  loi n° 2019-570 du 26 juin 2019 sur le mariage

[24] L’article 62 de la  loi n° 2019-570 du 26 juin 2019 sur le mariage

[25] L’article 72 de la  loi n° 2019-570 du 26 juin 2019 sur le mariage

[26] L’article 73 de la  loi n° 2019-570 du 26 juin 2019 sur le mariage

[27] L’article 74 de la  loi n° 2019-570 du 26 juin 2019 sur le mariage

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Toni Lokadi

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