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La société par actions simplifiée

C’est depuis le 30 janvier 2014, que les États membres de l’OHADA ont décidé d’introduire dans leur environnement juridique une nouvelle forme de société : la Société par Actions Simplifiée (en sigle SAS). Cette forme sociétaire, encore très méconnue en Afrique, semble connaître à l’heure actuelle un succès grandissant. Ce succès est dû au fait que ses règles de fonctionnement, beaucoup plus souples que celles des autres types de Sociétés, laissent une grande latitude aux associés pour organiser leurs rapports entre eux et avec la Société. Constituer cette forme société relève en effet du sur-mesure.

Sa caractéristique principale repose  dans sa souplesse organisationnelle et fonctionnelle ainsi que dans sa dominante contractuelle.

La société par actions simplifiée est, précise l’article 853-1 de l’AUSCGIE OHADA révisé, « une société instituée par un ou plusieurs associes et dont les statuts prévoient librement l‘organisation et le fonctionnement de la société sous réserve des règles impératives du présent livre. Les associés de la société par actions simplifiée ne sont responsables des dettes sociales qu’à concurrence de leurs apports et leurs droits sont représentés par des actions »

Elle coexiste dorénavant avec les autres formes de sociétés commerciales que sont la société anonyme (SA), la société en commandite simple (SCS), la société en nom collectif (SNC), la société à responsabilité limitée (SARL).

Elle est organisée par les articles 853-1 à 853-23 de l’acte uniforme relatif aux sociétés commerciales et au groupement d’intérêt économique. La société par actions simplifiée est une forme de société assez atypique. Elle est caractérisée principalement par la liberté accordée aux associés relativement à son organisation et à son fonctionnement. Sa nature et son régime traduisent sa particularité.

1. La nature de la SAS 

Plusieurs éléments permettent de caractériser la SAS.

1. La SAS est une société à risques limités. Les associés ne sont responsables des dettes sociales qu’à hauteur leurs apports; elle se rapproche donc de ce point de vue de la SARL et de la SA.

2. La SAS est une société par actions : en contrepartie de leurs apports, les associés reçoivent des actions et non pas des parts sociales.

3. La SAS est une société ne faisant pas appel public à l’épargne c’est-à-dire que ses titres ne sont pas négociables sur le marché boursier. En cela elle se différencie de la SA qui, dans certaines conditions peut faire appel public à l’épargne.

4. La SAS peut être une société pluripersonnelle ou unipersonnelle (dans ce cas, on parle de la SASU): le législateur a consacré aussi bien la SAS comprenant plusieurs actionnaires que la SAS qui n’a qu’un seul actionnaire. Il y a là un point commun avec la SA qui peut aussi être unipersonnelle.

5. La SAS est surtout une société flexible qui peut être librement organisée par les associés notamment pour ce qui est du capital social, du nombre d’associés, des modes d’administration, etc.

6. La SAS n’est pas une société à capital variable, mais elle peut le devenir.

7. La SAS n’a pas de capital social minimum; les parties fixent librement le capital social ainsi que le montant nominal des actions et les conditions de libération des apports.

2. Le régime juridique de la SAS

Comme conséquence de sa nature particulière, la SAS n’a pas de régime juridique propre. Elle est librement organisée par les actionnaires conformément à l’article 853-7 qui dispose que « les statuts fixent les conditions dans lesquelles la société est dirigée ». Le seul organe obligatoire prévu dans la SAS est le Président qui représente la société à l’égard des tiers ( art. 853-8). Les autres pouvoirs sont exercés par l’Assemblée générale ( art. 853-11).

Par ailleurs, l’article 853-3 prévoit que sauf exception les règles prévues pour les sociétés anonymes s’appliquent à la SAS. Parmi les exceptions, on note que la présence du commissaire aux comptes n’est pas obligatoire sauf dans les cas prévus par l’article 853-13.

Plus de cinq ans après l’adoption de l’Acte uniforme relatif au droit des sociétés commerciales et du groupement d’intérêt économique (AUSCGIE), on peut se demander si les fruits ont tenu la promesse des fleurs.

L’engouement que devait susciter la SAS est-il perceptible ? Faute de statistiques, nous ne pouvons pas nous prononcer sur le nombre de SAS créées en République démocratique du Congo et dans l’espace OHADA et encore moins faire une comparaison de ce nombre et celui des autres formes de sociétés concurrentes telles que la SARL. Peut-être vaut-il mieux laisser un peu de temps au temps.

À LIRE

Pourquoi dans la SAS actions est au pluriel alors que simplifiée est au singulier ?

Sont applicables à la SAS :

• les articles 694 à 822 ; 853-1 à 853-25 de l’AUSCGIE;

• les règles concernant la constitution (libération, publicité) le contrôle, la dissolution, la liquidation des S.A. ainsi que celles relatives aux valeurs mobilières ;

• les dispositions générales sur les sociétés commerciales (art. 4 à 269) et celles de l’AUSCGIE qui n’y dérogent pas.

Pour l’application de ces règles et à défaut de stipulations statutaires spécifiques, les attributions du conseil d’administration ou de son président  sont exercées par le président dans la société par actions simplifiée ou  celui ou ceux de ses dirigeants que les statuts désignent à cet effet.

Un nouvel article 853-7 prévoit que:

• Les organes de direction de la société sont fixés en toute liberté par les statuts.

Les statuts mais également les pactes extra-statutaires fixent donc les  conditions dans lesquelles la société est dirigée.

Et l’article 853-8 nouveau de préciser que :

• Le président, qui est le seul organe obligatoire, peut être une personne physique ou une personne morale;

• Reprise de la solution donnée pour la SA par l’art. 465, al. 4 s’agissant des attributions du Président de la SAS;

• Transposition de la solution donnée pour la SA par l’art.465, al. 5.

Dans ses rapports avec les tiers, la société est engagée par les actes du  président qui ne relèvent pas de l’objet social, dans les conditions et limites  fixées à l’article 122 de l’AUSCGIE.

Les statuts peuvent prévoir les conditions dans lesquelles une ou plusieurs  personnes autres que le président, portant le titre de directeur général ou de  directeur général adjoint, peuvent exercer les pouvoirs confiés à ce dernier par la loi.

Les stipulations des statuts, les décisions des organes sociaux limitant les  pouvoirs du président sont inopposables aux tiers de bonne foi

Le nouvel article 853-9 dispose que:

Lorsqu’une personne morale est nommée président ou dirigeant d’une société  par actions simplifiée, les dirigeants de ladite personne morale sont soumis aux  mêmes conditions et obligations et encourent les mêmes responsabilités  civile et pénale que s’ils étaient président ou dirigeant en leur nom  propre, sans préjudice de la responsabilité solidaire de la personne morale qu’ils dirigent.

Cette disposition vise à assurer une garantie tant pour la société, les associés  que les tiers à celle-ci.

Et de la même manière, l’article 853-10 nouveau dispose que : Les règles fixant la responsabilité des membres du conseil d’administration des  sociétés anonymes sont applicables au président et aux dirigeants de la  SAS.

En droit français[1], mis à part quelques dispositions impératives, les statuts  peuvent organiser le fonctionnement de la SAS avec une grande souplesse. Cette forme de société peut donc s’adapter parfaitement à la situation  particulière d’une petite entreprise.

En effet, les statuts déterminent librement les formes et les conditions dans  lesquelles sont prises la plupart des décisions collectives (les décisions peuvent être prises en assemblée ou par correspondance ou par l’établissement d’un acte signé par tous les associés, etc…).

Sont cependant obligatoirement soumises à l’unanimité, les décisions concernant :

  • l’exclusion d’un associé,
  • la transformation d’une société préexistante en SAS,
  • l’augmentation des engagements de tous les associés,
  • le transfert du siège social à l’étranger.

Les décisions qui seraient prises en violation des dispositions légales ou  statutaires relatives aux conditions de validité des décisions collectives,  peuvent être annulées à la demande de tout intéressé.

De la même manière, le seul organe directorial obligatoire est le président qui  peut bénéficier d’un contrat de travail antérieur ou postérieur à sa nomination.  Même s’il possède 99 % des actions de la société ou s’il en est l’associé unique, il bénéficie du régime fiscal et social des salariés.

Et, dans les sociétés pluri-personnelles, l’assemblée générale des associés  fixe tous les ans la rémunération du président. Celle-ci doit figurer au procès verbal. Un conseil d’administration n’est pas obligatoire comme dans les S.A.

S’agissant des associés, un autre avantage de la SAS consiste en la  possibilité pour la société de décider de l’exclusion d’un associé.

Par ailleurs, les statuts peuvent prévoir les conditions dans lesquelles un associé peut se retirer de la société, cette dernière devant alors lui racheter ses actions.

Il est possible aussi, pour assurer une certaine stabilité à la société, d’insérer dans les statuts une clause d’inaliénabilité des actions, ceci pour une durée maximum de dix ans.

4. Capital social

nouvel article 853-5 prévoit que :

• Le montant du capital social ainsi que celui du nominal des actions est fixé par les statuts.

• La société par actions simplifiée peut émettre des actions inaliénables résultant d’apports en industrie.

• La société par actions simplifiée peut émettre des actions résultant d’apports en Industrie.

• Les statuts déterminent les modalités de souscription et de répartition de ces actions.

Les apports peut-être soit :

  • en nature
  • en numéraire
  • en industrie : à travers une mise à la disposition effective de sa connaissance professionnelle ou services à l’égard de la société

5. Nombre d’associés:

• Il suffit à deux associés de réunir pour créer une SAS pluripersonnelle.

• Il est également possible de créer une société par actions simplifiée avec un associé unique (SASU)

6. Les insuffisances de la SAS

Malgré ses avantages, cette forme de société de capitaux qu’est la SAS, ne peut pas être cotée en bourse. Elle ne permet donc pas de faire un appel public à l’épargne. Ce qui peut constitue une restriction dans un climat de rareté de ressources.

Entre autres limites visant à protéger l’intérêt des tiers, malgré la liberté contractuelle, la SAS est assujettie aux règles impératives du droit des sociétés commerciales, précisément les règles applicables aux sociétés anonymes. «C’est également une société où la liberté n’exclut pas la protection des tiers parce que les clauses limitant les pouvoirs des dirigeants sont inopposables aux tiers»

En somme, ce qu’il convient de retenir, la SAS offre :

• La souplesse contractuelle : liberté accordée aux associés pour déterminer les règles de fonctionnement et de transmission des actions.

• La simplification du formalisme dans les SASU.

• La responsabilité des actionnaires limitée aux apports.

• La structure évolutive facilitant le partenariat.

• La possibilité de constituer une SAS avec un seul associé (et donc de créer une filiale à 100 %).

• La possibilité de consentir des options de souscription ou d’achat d’actions aux dirigeants et/ou aux salariés de la société.

• La crédibilité vis-à-vis des partenaires (banquiers, clients, fournisseurs).

Référence

[1] Présentation de la SAS au regard des nouvelles règles envisagées par le projet OHADA relatif au droit des sociétés Aspects de droit comparé voir COLLOQUE AEDJ  30 ET 31 JANVIER 2013 – DOUALA  6 ET 7 FEVRIER 2013 – YAOUNDE

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Toni Lokadi

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Lorsqu'on dit on dit société par actions simplifiée, actions à s parce qu’elle renvoie à la société par actions. Cela

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