Déontologie

Le pacte de quota litis

Le pacte de quota litis est une convention par laquelle un avocat s’engage à ne percevoir des honoraires qu’en cas de succès du procès, et à les calculer en fonction d’un pourcentage du montant de la condamnation ou de la transaction.

Ce type de contrat est-il licite en France ? Quels sont les avantages et les inconvénients d’un tel pacte ? Quelles sont les conditions et les limites de sa validité ? Quelles sont les obligations de l’avocat et du client dans ce cadre ? Comment rédiger un pacte de quota litis conforme à la déontologie et à la loi ? Voici les cinq questions auxquelles nous allons répondre dans cet article juridique :

1. Qu’est-ce que le pacte de quota litis et pourquoi est-il controversé ?

Le pacte de quota litis, aussi appelé pacte de succès ou pacte aléatoire, est une convention par laquelle un avocat s’engage à ne percevoir des honoraires qu’en cas de succès du procès, et à les calculer en fonction d’un pourcentage du montant de la condamnation ou de la transaction. Il s’agit donc d’un contrat aléatoire, qui dépend de l’issue incertaine du litige. Le pacte de quota litis se distingue du pacte de quota litigiosus, qui prévoit que l’avocat recevra une partie du bien litigieux en cas de gain du procès.

Le pacte de quota litis est souvent présenté comme un moyen d’accès à la justice pour les justiciables qui n’ont pas les moyens de payer des honoraires fixes ou forfaitaires à leur avocat. Il permet également à l’avocat de partager le risque et le bénéfice du procès avec son client, et de le motiver à défendre au mieux ses intérêts. Toutefois, le pacte de quota litis soulève aussi des critiques et des interrogations, notamment sur sa conformité aux principes déontologiques qui régissent la profession d’avocat.

Certains y voient une atteinte au caractère libéral et indépendant de l’avocat, qui pourrait être tenté de privilégier son intérêt personnel au détriment de celui de son client, ou d’engager des procédures abusives ou dilatoires pour augmenter ses chances de succès. D’autres craignent que le pacte de quota litis ne favorise une justice à deux vitesses, où seuls les litiges les plus rentables seraient défendus par des avocats, au détriment des causes moins lucratives mais plus importantes sur le plan social ou moral.

2. Quel est le régime juridique du pacte de quota litis en France ?

Le pacte de quota litis n’est pas expressément interdit ni autorisé par la loi française. Il est cependant soumis à un régime juridique complexe et évolutif, qui résulte de la combinaison des sources suivantes :

  • Le code civil, qui pose le principe général de la liberté contractuelle entre l’avocat et son client, mais qui prohibe les contrats léonins (article 1167) et les contrats aléatoires portant sur des choses qui dépendent uniquement du sort (article 1964).
  • Le code de procédure civile, qui dispose que l’avocat a droit aux honoraires convenus avec son client, sous réserve du contrôle du juge (article 10).
  • Le code de déontologie des avocats européens, qui interdit aux avocats d’établir leurs honoraires uniquement en fonction du résultat obtenu ou du succès escompté (article 3.3).
  • Le règlement intérieur national (RIN) de la profession d’avocat, qui précise que l’honoraire ne peut être exclusivement déterminé en fonction du résultat judiciaire (article 11.3), mais qu’il peut être complété par un honoraire complémentaire en fonction du résultat obtenu ou du service rendu (article 11.4).
  • La jurisprudence des tribunaux et des ordres professionnels, qui apprécient au cas par cas la validité et l’opposabilité des pactes de quota litis conclus entre les avocats et leurs clients.

Ainsi, le pacte de quota litis n’est pas illégal en soi, mais il doit respecter certaines conditions et limites pour être valide et opposable. Il doit notamment être proportionné au travail effectué par l’avocat, ne pas porter atteinte à son indépendance et à sa dignité, et ne pas créer de déséquilibre manifeste entre les parties. Il doit également être conclu par écrit, être soumis à l’approbation du bâtonnier, et être communiqué au juge en cas de contestation.

3. Quels sont les avantages et les inconvénients du pacte de quota litis pour l’avocat et pour le client ?

Le pacte de quota litis présente des avantages et des inconvénients tant pour l’avocat que pour le client, qui doivent être pesés avant de conclure un tel contrat.

Pour l’avocat, les avantages du pacte de quota litis sont :

  • Il peut attirer une clientèle qui n’aurait pas les moyens de le rémunérer autrement, et ainsi élargir son champ d’activité.
  • Il peut bénéficier d’une rémunération plus élevée en cas de succès du procès, qui récompense son travail et son implication.
  • Il peut partager le risque et le bénéfice du procès avec son client, et ainsi renforcer la confiance et la collaboration entre eux.

Les inconvénients du pacte de quota litis pour l’avocat sont :

  • Il s’expose à un risque financier en cas d’échec du procès, qui peut compromettre son équilibre économique.
  • Il peut être soumis à une pression accrue de la part de son client, qui attend de lui un résultat favorable.
  • Il peut être confronté à des difficultés pour recouvrer ses honoraires auprès de son client ou de la partie adverse, qui peuvent contester le montant ou la validité du pacte.

Pour le client, les avantages du pacte de quota litis sont :

  • Il peut accéder à la justice sans avoir à avancer des frais d’avocat, ce qui lui permet de faire valoir ses droits sans craindre pour sa situation financière.
  • Il peut bénéficier d’un avocat motivé et compétent, qui s’engage à défendre au mieux ses intérêts.
  • Il peut profiter d’une rémunération proportionnée au résultat obtenu, qui ne grève pas excessivement ses gains.

Les inconvénients du pacte de quota litis pour le client sont :

  • Il doit renoncer à une partie du montant de la condamnation ou de la transaction, ce qui peut réduire son indemnisation.
  • Il peut être incité à accepter une transaction moins favorable que celle qu’il aurait pu obtenir sans le pacte, pour éviter un procès aléatoire ou pour satisfaire son avocat.
  • Il peut être victime d’un abus de la part de son avocat, qui pourrait lui imposer un pacte disproportionné ou contraire à ses intérêts.

4. Quelles sont les obligations de l’avocat et du client dans le cadre d’un pacte de quota litis ?

Le pacte de quota litis est un contrat qui crée des obligations réciproques entre l’avocat et le client. Ces obligations sont les suivantes :

  • L’avocat doit informer le client des modalités et des conséquences du pacte, ainsi que des autres modes de rémunération possibles. Il doit également lui remettre une note d’honoraires détaillée et justifiée à la fin du procès.
  • L’avocat doit respecter les règles déontologiques qui régissent sa profession, notamment le secret professionnel, le conflit d’intérêts, la modération et la proportionnalité des honoraires. Il doit également agir avec diligence, compétence et loyauté envers son client.
  • Le client doit respecter les engagements pris dans le pacte, notamment en ce qui concerne le paiement des honoraires en cas de succès du procès. Il doit également collaborer avec son avocat et lui fournir tous les éléments utiles à la défense de ses intérêts.

En cas de manquement à ces obligations, l’une ou l’autre des parties peut demander la résiliation ou la révision du pacte, ou engager la responsabilité de l’autre partie devant les juridictions compétentes.

5. Comment rédiger un pacte de quota litis conforme à la déontologie et à la loi ?

Pour rédiger un pacte de quota litis valide, il faut :

  • Prévoir un honoraire minimum forfaitaire ou au temps passé, qui couvre les frais et charges de l’avocat, indépendamment du résultat du litige.
  • Fixer un honoraire complémentaire proportionnel au résultat obtenu, qui ne doit pas être excessif ni dérisoire. Le pourcentage doit être déterminé en tenant compte de la difficulté de l’affaire, des intérêts en jeu, du travail fourni par l’avocat et des chances de succès.
  • Mentionner expressément que le pacte de quota litis est soumis à l’approbation du bâtonnier, qui vérifie sa conformité à la déontologie et à la loi.
  • Faire signer le pacte de quota litis par l’avocat et le client, et le remettre au bâtonnier dans les 15 jours suivant sa signature.
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Toni Lokadi

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